Aujourd’hui,
Bastien suit les grands : c’est la fête
dans son village.
Tous les enfants sont déguisés et défilent dans les rues,
accompagnés de leurs parents.
L’enfant
ne les reconnaît pas tous, alors maman lui explique :
- « Celui-ci, le squelette, c’est Stephen et voilà Léna,
la sorcière aux grands ongles ! Et, regarde, c’est Chloé
ta cousine ! »
Chloé est
bien jolie. Elle aussi a choisi un costume de sorcière mais elle
est encore plus belle qu’une fée ! Bastien est émerveillé…
Chloé est sa cousine préférée, sans doute parce qu ‘elle
ressemble à sa maman. Elle sait tout faire à la perfection !
Cependant, comme certains enfants, masqués et effrayants, sont
impossibles à identifier, Bastien éprouve une certaine crainte
quand il les croise.
Le
diable, sans visage, qui sautille près d’eux est affreux et le
nain qui a une énorme tête plastifiée l’est tout autant !
L'enfant serre alors un peu plus fort la main de maman pour se
rassurer.
Le petit est travesti comme les autres…
Sa mère lui a cousu un magnifique déguisement de magicien,
brillant et si doux à caresser !
Et, bien sûr, elle a pensé au grand chapeau noir et à la baguette
magique. Il est très fier !
La nuit commence à tomber. C’est le moment d’allumer les
lampions citrouille et de parcourir le village afin de récolter une
énorme quantité de bonbons.
Une à une, des petites lampes
oranges
s’allument
un peu partout . Le village est métamorphosé. Et le petit garçon
perd alors tous ses repères… Il ne reconnaît plus la rue qui mène
à l’école ou celle de la maison. Il est comme dans un autre
village, très, très loin… Certainement pas le sien !
Chloé
s’approche alors :
_
« Viens avec moi, Bastien, nous allons bien nous amuser !
Maman
acquiesce mais elle fait, auparavant, des recommandations à la
grande cousine :
_
Pas trop longtemps… et surtout ne le laisse pas seul !…
Attention aux voitures !… »
Et
voilà les deux enfants partis, tout heureux d’aller rejoindre les
autres qui attendent, à l’écart.
La sorcière
, le magicien,
la vieille décrépie, le robot et la momie vont de concert à
la chasse aux bonbons. Ils frappent seulement à la porte des
maisons dont la fenêtre est illuminée par une bougie : c’est un
signal pour les enfants. Ils ne dérangeront personne ainsi :
Certains villageois n’apprécient guère cette fête, alors il est
recommandé de les éviter…
Bientôt
le panier qui recueille leur butin commun est presque plein…
Bastien aurait bien croqué une grosse
fraise rose, dès
la première récolte, mais sa cousine
lui a expliqué qu’il fallait avoir fini la tournée pour procéder
à un partage équitable.
A
présent, il est tard et les petits monstres d’un soir désertent
peu à peu les ruelles. Les maisons où l’on peut encore
apercevoir des bougies scintillantes sont beaucoup moins nombreuses.
Bastien se sent tout d'un coup si fatigué, fatigué.... Ses jambes
tremblent, sa tête est lourde alors il s’assoit sur une grosse
pierre tandis que les plus grands continuent leur chemin et
l’oublient : il est si sage ! Aucun d’entre eux n’a
remarqué que le petit ne suivait plus, même
pas Chloé !
Bastien
pense : « Je me repose et je
les rejoindrai, tout à l’heure ! »
Mais
le petit somnole un peu et quand il s’éveille, il ne voit plus
personne dans la rue... plus de lumière et plus de bruit ou
presque. Le vent de novembre souffle et
s’accroche à son vêtement de magicien. Bastien frissonne et a très
peur, maintenant. Il se sent tout petit et vulnérable. Que
sont devenus les autres ?
Il court au hasard à leur recherche.
Plus loin, derrière les arbres noirs menaçants, il croit entendre
le rire de sa cousine… Mais il est déçu. Il faut se rendre à
l’évidence, Chloé l’a oublié et il s’est perdu dans
l’immensité de la nuit ! Mais, dans l’obscurité, juste à
ses pieds, gît sa baguette de magicien : inutile et
incroyablement minuscule, dérisoire ! Alors d’un coup de
pied, violent et désespéré, il l’envoie voltiger sur le
trottoir d’en face…
C’est alors qu’une douce musique,
surgie de nulle part, lui parvient. Elle semble lui parler, lui
murmurer un secret à l’oreille. Elle est, il en est persuadé, le
lien qui l’unit à sa maman. Elle l’invite à le suivre,
l’enveloppe et le protège. Il se laisse donc guider dans le dédale
des ruelles et oublie aussitôt ses peurs et sa fatigue. Le temps
suspend son cours…
Lorsqu’il
prend conscience de la réalité, il aperçoit sa mère et Chloé
qui le cherchent, une pile électrique à la main ! La curieuse
musique s’en est allée. A présent, c’est la voix chaude de
maman qui le berce et le cajole.
Il s’endort ainsi, paisiblement, dans ses bras, sur le chemin du
retour
tout en rêvant à d’énormes bonbons au goût de fraise !
Texte
Jocelyne Marque
institutrice -
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